A façade unique, projet atypique
Située dans le centre de Jodoigne, cette habitation mitoyenne a représenté un vrai défi architectural. Bien qu’une habitation - insalubre - y était préexistante, l’atelier d’architecture Mathen est parti d’une feuille blanche pour aménager, sur cette parcelle triangulaire de 22 m² au sol, une bâtisse de trois étages où chaque centimètre a été exploité. Ne disposant que d’une façade pour prendre la lumière et dégager les vues, la réflexion s’est portée sur le positionnement exact des fonctions.
Singularité typologique du centre de Jodoigne, la parcelle triangulaire, avec l’espace rue pour seule ouverture possible, a accueilli un projet de logement atypique. A son sujet, les architectes évoquent d’ailleurs « une couture volumétrique contemporaine du bâti préexistant ». Ce projet affirme ses différences au sein de son expression architecturale tout autant que par la matérialité qui le compose.
Un défi de taille
Bien que les dimensions de la parcelle soient forcément limitées, le défi qui s’est présenté aux architectes était de taille. Dans un objectif global de rendre l’accès au logement en centre urbain pour enrayer la désertification du centre-ville, le projet visait, selon les architectes, « à rendre une cohérence aux gabarits en présence par une harmonisation avec ceux-ci, à potentialiser au mieux les gabarits disponibles donnés par les pignons mitoyens et à dynamiser une singularité urbanistique du cœur de ville ». Traduction concrète de cette volonté de cohérence de gabarits, le projet relie les niveaux des faîtières et des gouttières des bâtiments contigus pour réaliser la continuité bâtie, et harmonise, par ce biais, les gabarits perçus depuis l’espace public.
Contemporanéité du volume
« L’expression volumétrique de cette transformation, par les jeux de plein-vide et d’alignement-retrait, confère un caractère contemporain à l’habitation », continuent les architectes. Le projet est une construction en ossature bois afin de maximiser les présences d’isolation au sein de parois de faible épaisseur. A l’intérieur, un mur porteur en bois contre-cloué (10 cm d’épaisseur) traverse les étages de la construction. Quant aux parois, elles ont été conçues les plus écologiques possible : bardage en bois thermo traité, panneaux de fibre de bois contreventant, flocage de cellulose, plaques de gypse...
Lumière et positionnement des fonctions
« Ne disposant que d'une façade pour prendre la lumière et dégager les vues, notre réflexion s'est portée sur le positionnement exact des fonctions », précise-t-on à l’atelier d’architecture Mathen.
« Ainsi, seules les pièces de vie et de nuit sont présentes sur l'unique façade. L'épaisseur constituée par les locaux techniques et d'usages s'insère en second plan, permettant ainsi de libérer l'espace nécessaire au sein de l'angle aigu de la parcelle pour la colonne vertébrale que constitue l'escalier à noyau ouvert, surplombé par une fenêtre de toit distillant une douce lumière naturelle au travers des niveaux de l'habitation. »
En façade, les baies à dominante verticale s’intègrent harmonieusement au sein des constructions voisines plus traditionnelles, mais tout en gardant la singularité du lieu. « Ces baies suivent le décalage existant entre celles des deux bâtiments contigus pour servir d’articulation architecturale au sein de la rue, à l’angle formé justement à cet endroit par les portions de rue droite identifiables.
Ce positionnement, ainsi que le bardage ajouré présent devant la porte d’entrée vitrée, permettent l'entrée de lumière naturelle dans les espaces majeurs tout en ménageant l'intimité nécessaire aux activités présentes. La grande baie, expression première de cette habitation, lie les espaces de séjour du rez-de-chaussée et du 1er en reprenant les gabarits et proportions des devantures commerciales présentes. »
Quant à la plus petite baie, elle lie séjour et chambre (1er et 2e) en un mouvement vertical analogue à la superposition des baies présentes sur la façade du bâtiment de droite.
Façade et charpente, en lien avec le passé historique
« Le revêtement de façade est un bardage en bois vertical ajouré de teinte brun clair. Il s’agit d’un bois indigène traité thermiquement pour maintenir sa teinte naturelle. Il rappelle le fait qu’avant la pétrification de nos villes, l’ensemble des constructions d’habitations étaient en bois. Cette utilisation est ici rendue possible par la singularité du lieu, qui ne présentait pas de front d’alignement commun aux autres constructions. »
La charpente a, pour sa part, fait l’objet de techniques parfois oubliées par les entreprises « puisqu’il s’agit d’une surface gauche réglée, seule à même de marier les pentes et les altimétries différenciées entre les constructions voisines. »
Economies d’énergie
Ce logement n'utilise que peu d’espace au sol : il est donc économe dans son utilisation de l’énergie par la compacité de la construction et par la diminution des surfaces de déperdition. Une ventilation mécanique double-flux à récupération de chaleur et une chaudière à condensation ont été installées afin d'optimiser le rapport coût/efficacité.
« Hautement performant d’un point de vue énergétique, le bâtiment est également ‘pensé durable’ par les matériaux et techniques employées au sein d’une construction dont le démontage/recyclage sera rendu plus évident qu’au sein de constructions traditionnelles », concluent les architectes.