Archi-militant : l’économie des ressources, outil de productivité
Souvenez-vous : fin décembre, je remerciais ce cher Vladimir d'avoir mis la pression maximale sur le gaz. En faisant monter les prix plus que de raison, le bougre avait alors permis au cénacle politique belge de tomber d'accord : il fallait prolonger nos vieilles centrales nucléaires. Un bricolage express qui a été - il faut bien l'admettre - accueilli avec soulagement par l'industrie, notamment par celle dont la production est très gourmande en énergie comme les acteurs verriers par exemple.
On comptait évidemment pouvoir en rester là, mais le petit Vladimir avait encore dans son coffre à jouets quelques surprises comme des chars d'assaut, des lance-roquettes et autre missiles de moyenne et longue portées qu'il n'a pas hésité à mobiliser dès le 24 février, plongeant le monde dans l'incertitude la plus complète. Résultat des courses : les tensions dont le secteur de la construction n'avait pas besoin se sont accentuées. Et un cercle vicieux a commencé à s'installer dans nos sociétés : après la hausse du prix des énergies, on a assisté à la hausse du prix du blé, des produits transformés, puis, à travers le jeu de l'indexation, les salaires qui représentaient déjà une charge significative pour le secteur sont devenus encore plus pesants. Ne parlons pas de l'acier, du zinc, du béton, du verre, du bois ou encore des briques dont les prix ont poursuivi leur ascension vertigineuse, prix qui contraignent les fournisseurs à imposer des devis qui tiennent quelques jours voire quelques heures. A ce compte, tout le monde est touché : les négociants de matériaux, les promoteurs, les architectes et, en fin de compte, les maîtres d’ouvrage.
A ce régime, comment les professionnels du secteur doivent-ils réagir ? Certains ont décidé d'entrer en hibernation. D'autres, de faire porter tout ou partie de la surcharge sur le client final. D'autres encore, plus kamikazes, ont décidé de prendre en charge les surcoûts. Une autre piste semble pouvoir se dessiner. Et elle a déjà été évoquée elle aussi à plusieurs reprises dans ces colonnes : c'est celle de l'économie des ressources. Le journaliste Remy Baroux écrivait déjà dans Le Monde il y a près de dix ans, à l'heure où Greta Thunberg était encore au berceau, que l'économie des ressources était appelée à devenir « un nouvel outil de productivité ». Interrogé à ce sujet, l'ancien Commissaire européen Janez Potočnik avait alors à juste titre précisé que l'efficacité dans la gestion des ressources devait être désormais considérée « comme une nouvelle stratégie industrielle, et pas seulement comme l'intégration de mesures environnementales », ajoutant que si les économistes aiment à parler de coût de main-d'œuvre unitaire et de productivité du capital, il était aussi grand temps de parler de celle des ressources et de convaincre les entreprises de s'y intéresser. Ces paroles ont été prononcées en 2013, près de dix avant que la Russie n’envahisse l’Ukraine, et huit ans avant l’annexion de la Crimée.