Archi-militant : La Belgique, pays de brols architecturaux

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Pays de liberté, et même de toutes les libertés, la Belgique est bien connue pour son approche particulière de l’architecture.

 

Je ne parle pas ici du goût des architectes, ni de leur capacité à ériger de beaux édifices, bien pensés et bien inscrits dans leur époque, mais du goût de Monsieur et Madame tout le monde pour ce qu’ils pensent être de l’architecture.

Toiture en forme de pagode par-ci, clôture en style asiatisant ou balcon hispanisant par-là … En fin de compte, en Belgique, l’architecture est à l’image de son peuple : cosmopolite, bigarrée, hétéroclite... Et en fin de compte, on ne peut rien y trouver à redire. Sauf qu’à force de traverser une rue au bout de laquelle on a pu admirer tous les styles architecturaux de la planète sans avoir pris l’avion, j’en viens parfois à avoir la tête qui tourne. Les jours de très grande fatigue, sans rire, quand je suis en déplacement aux confins de la province de Hainaut, en banlieue anversoise et même dans certains coins urbanisés du Namurois, j’en arrive parfois à me demander si je ne me suis pas perdu. Lorsque je reprends mes esprits, c’est la mauvaise humeur qui monte, moi qui ai dû introduire une demande de permis pour remettre en état à l’identique un perron dans ma maison fin 19e. Fait-on autant de misère au propriétaire à qui vient l’idée de placer, devant l’entrée de sa magnifique fermette rustique début 21e siècle, un escalier monumental dont on ne sait s’il s’inspire des pyramides, du folklore tyrolien ou des temples grecs ?

A ce jeu, le vlogueur belge Hannes Coudenys a chaque année l’embarras du choix pour trouver les lauréats du Ugly Belgian Houses, le concours des constructions belges les plus laides. Le pire, c’est que les lauréats semblent souvent ravis d’avoir les honneurs de figurer dans ce hit-parade des maisons les plus mal fichues. En réalité, c’est sans doute là un peu la manifestation de ce fameux esprit de dérision qui nous distingue de nos voisins d’outre-Quiévrain. En Belgique, on ne craint pas le ridicule, on s’en badigeonne, on s’y roule et on s’y vautre, histoire de ne pas faire les choses à moitié. Très bien: c’est là la fameuse liberté à la belge que j’évoquais au début de ce billet. Sauf que, ces brols architecturaux ostensiblement étalés, en fin de compte, c’est davantage le passant qui doit se les farcir plutôt que celui qui y vit.

Bref, je sais ce qu’il me reste à faire : m’installer dans la pagode de mon voisin d’en face et lui céder ma maison fin 19e. J’aurai enfin le grand privilège de ne plus avoir la vue bouchée par la grande muraille de Chine. Et je pourrai admirer depuis ma nouvelle demeure ce fameux perron que j’ai rénové avec autant d’efforts !

 

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