Archi-militant : Mettre les mains dans le Gablok

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C'est fou ce que les contraintes qui pleuvent sur nous éveillent la créativité dans le domaine de l'art de construire. Il y a un peu moins de deux ans, avec la crise COVID, ce sont les réaménagements d'espaces de travail et le développement des bureaux de jardin qui ont fait parler d'eux. Plus récemment, avec la pénurie de bois qui est pompé de nos forêts par la Chine par centaines de milliers de stères, ce sont les matériaux composites qui ont fait parler d'eux. Et avec cette fameuse pénurie de main-d'œuvre qui frappe le secteur de la construction depuis quelques années, c'est Gablok qui est sorti de terre.

 

Gablok ? Encore une entreprise de construction qui s'est délocalisée en Pologne ou en Tchéquie ? Que nenni ! Gablok est, si j'ose dire, une bonne entreprise wallonne dont le nom provient de la contraction du prénom du fondateur, Gabriel Lakatos, et du mot bloc. Le dada de Gabriel ? Construire vite et bien en limitant le nombre d'éléments techniques à huit : le chevron comme élément de liaison, l'élément de plancher, le linteau, la poutre, le bloc isolé de ceinture, le bloc isolé général, le bloc isolé de départ, la lisse de départ et la lisse supérieure. Tout cela est expliqué très succinctement et très clairement sur le site de la société et permet au maître d'ouvrage de construire lui-même vite et bien. Bref, un remake du système Lego que nombre d'entre nous ont connu dans leur plus tendre enfance.

En plus d'être facile à monter, Gabriel Lakatos fait la promesse de ne vous faire travailler qu'avec un nombre limité d'outils que chacun a chez lui ou, à tout le moins, qu'il pourra se faire prêter aisément : une visseuse, une perceuse... Tout cela serait vain sans un plan de montage clair comme de l'eau de roche. Et ici aussi, Lakatos a eu du flair. Toujours dans le registre de l'enfance, il a empoigné sa boîte de crayon de couleur pour phaser de manière très visuelle les différentes étapes de construction. Un peu comme des enfants pourraient le faire à l'école maternelle. Et ça marche: les maisons qui ont déjà été construites ne se comptent évidemment pas encore par millions, mais elles tiennent debout.

Des murs qui tiennent debout, c'est bien, mais le style dans tout ça? Ici, en bon homme d'affaires qu'il est, Lakatos revient aux fondamentaux : à l'intérieur et à l'extérieur, le client choisit la finition qu'il souhaite. Pour l'extérieur par exemple, après avoir revêtu la paroi de blocs d'une couverture d'étanchéité, il est tout à fait possible de monter un mur de briques de parement. Et à l'intérieur, de tapisser le tout de placoplâtre sur lequel viendront se placer n'importe quels éléments de finition. Bref, a priori ni plus beau ni plus laid que ce qui se voit déjà dans le paysage...

Simple, (un peu plus) économique qu'une maison préfabriquée et trois fois plus rapide que la construction d'une maison traditionnelle. Je vous le disais : un fichu problème que cette pénurie de main-d'œuvre, mais aussi une vraie opportunité, celle de retrouver ce goût de faire les choses soi-même et de mettre les mains dans le Gablok.

Ce qui me réjouit surtout avec ce fameux système, c'est qu'il permet aux architectes de s'en donner à coeur joie : grâce à la modularité poussée du système, tout ou presque devient possible, un peu comme un enfant construirait une fusée en Lego... En témoigne par exemple la magnifique référence inscrite au palmarès de Gablok à Lasne. En outre, si on y réfléchit un peu, on se rend compte que Gablok propose une démarche circulaire. Sur son site, Gablok évoque l'upgradabilité du système, mais ne fait pas spécifiquement mention de la circularité. Or, avec ce système de blocs assemblés, l'autoconstructeur se donne la possibilité de déconstruire proprement son bâti. Tout comme Monsieur Jourdain avec la prose, Gablok fait de la circularité sans le savoir...

 

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