Archi-militant : Paille, mycélium et pépettes

Il y a quelques années, le biosourcé était synonyme de barbus-chevelus sympathiques qui avaient envie d’apporter leur écot à un développement plus durable, sans plus. Cette époque sera peut-être bientôt révolue. 

Loin de moi l’idée de me moquer de l’idéalisme des pionniers de l’écoconstruction et des partisans des matériaux biosourcés. Cette fraîcheur, cette naïveté même parfois touchante que l’on retrouve chez ces fameux barbus-chevelus a grandement contribué à faire de notre monde un monde un peu moins irrespirable. 

Aujourd’hui, l’attrait pour les matériaux biosourcés et pour les éléments de construction écologiques semble toutefois prendre une autre tournure. Il y a d’abord ces fameux baba-cools qui deviennent des performers économiques. A l’image des fondateurs de Paille-Tech qui mûrit dans ses process et dans son approche commerciale au point de voir disparaître le risque de faillite qui a longtemps menacé. En témoignent les marchés publics que la société coopérative décroche désormais “les doigts dans le nez”. Cela tranche avec l’époque où on les prenait “pour des clowns” comme le confiait le responsable de la coopérative Julien Lefrancq en 2023 à l’occasion d’une interview accordée à L’Echo. Désormais, même les banques sont à leurs côtés. C’est dire si la situation a évolué. Les choses sont sans doute un peu différentes pour Iso-Hemp dans la mesure où, bien qu’accros au durable, les fondateurs Olivier Beghin et Jean‑Baptiste de Mahieu ont immédiatement posé tous les jalons nécessaires qui lui permettent désormais de produire 5 millions de blocs par an, en bon ingé de gestion et en bon ingé civil qu’ils sont.

Dernièrement, une autre actualité m’a conforté dans cette impression que le durable occupe désormais une place à part entière dans l’économie belge. Elle vient du mastodonte Cordeel (l’entreprise vient d’annoncer le franchissement du milliard de chiffre d’affaires). Exclusivement concentrée sur les produits à valeur environnementale ajoutée, sa spin-out C-biotech s’est mis en tête de produire une brochette de produits biosourcés. Parmi les produits commercialisés, on trouve par exemple un panneau sandwich fabriqué à partir de chanvre et de mycélium. Et ce qui est rassurant à cet égard, c’est que C-biotech a l’intelligence de déborder du monde de la construction pour faire profiter d’autres secteurs de son savoir-faire. A titre d’exemple, la spin-out a ainsi installé le premier élément d’aménagement routier circulaire neutre en carbone à Lokeren, également produit à partir de chanvre mélangé à du plastique recyclé et à de déchets ménagers recyclés. Bref, la preuve par quatre que l’on peut désormais associer paille, mycélium et pépettes.

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