L’économie circulaire à l’honneur au Colloque Renovate
Le 23 novembre dernier se tenait dans les locaux de la Faculté d’Architecture La Cambre Horta, le colloque Renovate. L'après-midi était consacrée à l’intégration de l’économie circulaire en rénovation. Les architectes, chercheurs, professeurs et professionnels présents ont témoigné de leur intérêt pour le réemploi des matiériaux en rénovation. Voici un tour d’horizon des questions soulevées durant cette édition.
Partisans du « Craddle to Craddle »
Pour l’architecte Steven Beckers du bureau Lateral Thinking Factory, les éléments qui guident la conception, l’exploitation et la déconstruction d’un bâtiment, tels que l’énergie, le transport, les matériaux ou encore la biodiversité doivent être pensés de manière systémique et pas de manière individuelle. Pour que l’architecture devienne régénératrice, les déchets générés par la construction doivent devenir des ressources saines pour l’environnement et pour l’humain, et pouvoir être récupérés sans perte de qualité. C’est ce que l’on appelle l’ « upcycling », qui ajoute de la qualité à un matériau chaque fois qu’il est recyclé. Selon l’architecte, il est également important d’avoir un modèle économique qui permette d’avoir une « vision » pour le bâtiment, de penser à l’usage qui en sera fait après sa première vie. Pour l’architecte Sébastien Cruyt du bureau Synergy International, un projet se conçoit avec les différents intervenants du projet mais également avec toutes les personnes qui seront impactées par le projet dans le futur. L’architecte Sébastien Moreno-Vacca de l’agence d’architectes A2M défend une architecture contemporaine de qualité à haute valeur environnementale. Depuis 2007, le bureau réalise uniquement des projets basse énergie, passifs ou autonomes en énergie. Ce choix est lié à la volonté de tenir une ligne éthique et esthétique tout en cherchant à réfléchir aux attentes des usager et aux réalités urbanistiques du terrain.
Le cas de Bruxelles
Pour le philisophe et sociologue Eric Corijn, il faut avant tout inciter les architectes à définir un projet de société, à avoir une vision de ville écosystémique, territoriale, transversale et durable avant de construire. Selon lui, il y a trois défis à relever de manière systémique à Bruxelles : considérer la nature comme une ressource, réfléchir la ville en fonction des inégalités sociales et penser Bruxelles comme une ville-monde. Selon lui, la structure économique de Bruxelles n’est pas assez adaptée à la population mais sert encore trop à la périphérie.
En charge à Bruxelles-Environnement de toutes les actions d’économie circulaire mises en place dans le secteur de la construction, Isabelle Sobotka explique que le programme culturel en économie circulaire veut transformer les objectifs environnementaux en opportunités économiques, relocaliser l’économie à Bruxelles et contribuer à la création d’emploi. Les mesures mises en place dans ce programme ont pour but de soutenir les secteurs de la construction, des déchets, du commerce et de la logistique. Actuellement, la construction représente une économie linéaire : on extrait, on fabrique, on utlise, on élimine. L’économie circulaire propose de garder la matière dans le circuit économique le plus longtemps possible par la maintenance et le recyclage des bâtiments, et par le réemploi et la remanufacture des matériaux. Il est également important de concevoir les bâtiments par strates , indépendantes les unes des autres afin d’en faciliter la rénovation. L’utilisation de matériaux purs, à faible impact environnemental et qui peuvent être démontés doit être privilégiée. Au lieu de gaspiller les ressources et de produire des déchets, nous allons devoir apprendre à transformer nos déchets en ressources.
Stéphane Kampelmann, chercheur à la Faculté d’architecture La Cambre Horta estime qu’il n’y a pas une économie circulaire mais une multitude de trajectoires et qu’il est trop tôt pour écarter l’ensemble des pistes. Ces alternatives n’étant pas neutres en conséquences sociales, économiques et environnementales, quelle est la trajectoire vers l’économie circulaire qui convient le mieux pour Bruxelles ? Comment trier, traiter et collecter les matières organiques ? Selon lui, une piste de réponse serait d’encourager les initiatives citoyennes et d’aborder le sujet par commune plutôt que pour l’ensemble de la ville. Un traitement des déchets proche des habitations serait idéal d’un point de vue environnemental, économique et social. La technique, circulaire également, du traitement des déchets par biométhanisation industrielle pourrait être une autre option mais qui demanderait de plus grands investissements. Un compromis qui combinerait l’ancrage citoyen avec l’économie d’échelle nécessaire pour attirer les investissements et récolter les tonnes de déchets serait l’économie sociale solidaire à l’échelle d’une commune. Convertir les déchets en ressources dans des conteneurs organiques attirants. Pour le chercheur, l’économie circulaire bruxelloise doit être portée par des acteurs bruxellois. Autres point soulevé par Stephan Kampelmann : dans la rénovatoin, vaut-il mieux privilégier une approche innovative et la démontabilité ou bien récupérer des ressources existantes ? L’argent investi dans les constructions neuves va aux grands groupes de construction qui ne sont pas à Bruxelles et qui sont capables d’investir dans la formation, dans le passeport des matériaux, .. . Bruxelles dispose d’une main d’œuvre de qualité et donc si on conçoit un bâtiment en intégrant des matériaux récupérés, l’impact social et environnemental sera plus important. A Bruxelles il préconise donc une économie sociale et solidaire.
Les défis du futur
Claude Lenglet, directeur opérationnel Europe chez TIR Consulting Group, attire l’attention sur le mot « systémique » et suggère d’établir un grand plan de développement des énergies renouvelables tout en tenant compte de la mondialité, des bâtiments et des personnes. La région des Hauts de France l’a nommé comme pionnier de la troisième révolution industrielle avec deux objectifs : avoir une vision à long terme tout en prévoyant d’engager des transitions nécessaires pour créer de l’emploi. Selon lui, la troisième révolution industrielle ne fonctionnera pas sans économie circulaire.
Michaël Ghyoot, chargé de cours à la Faculté d’archietcture La Cambre/Horta, aborde les défis du futur du point de vue du réemploi des matériaux. Il existe une série d’entreprises actives dans la recirculation des éléments de construction avec des profils très diversifiés. Selon lui, il est important de créer une stimulation en prescrivant des matériaux de réemploi dans les nouveaux projets. Il est également important de trouver une adéquation entre le réemploi et les nouveaux usages, comme par exemple réaliser des fiches techniques plus complètes ou des tests spécifiques pour les matériaux de récupération.
Koen De Koster est le fondateur et CEO de BioOrg, une entreprise pionnière dans l’application de la « blue biotechnology in building & process environnements». De pair avec des universités et des instituts de recherche en Belgique et à l’étranger, l’entreprise examine l’influence des micro-organismes, bénéfiques lors de l’installation et la maintenance de l’équilibre biodynamique. BioOrg place l’humain en position centrale dans son environnement. L’entreprise ne travaille qu’avec des organismes positifs et sans produits chimiques agressifs. De cette manière, ils arrêtent l’empoisonnement de notre milieu intérieur et la destruction du milieu extérieur. Les organismes influencent fortement notre comportement et notre santé, c’est pourquoi la présence d’organismes positifs dans nos bâtiments et installations est d’une importance capitale.