Le 4 octobre dernier, la Bourse d’Anvers (Handelsbeurs) rénovée a rouvert ses portes. Afin de poursuivre au 21e siècle son rôle traditionnel de lieu de rencontres et d’événements, ce bâtiment emblématique a été remis à neuf, doté d’une nouvelle toiture en verre et équipé d’un parking souterrain. Mené en collaboration par le cabinet d’architecture eld, le bureau Origin - spécialisé dans la restauration - et l’entrepreneur Denys, le projet était sous la maîtrise d'ouvrage de Handelsbeurs Antwerpen NV.
Les visiteurs de la Bourse « ressuscitée » seront d’emblée frappés par la richesse des couleurs: la charpente métallique de la toiture a abandonné sa couleur rouille pour retrouver son vert éclatant d’origine, qui met bien en évidence les décorations florales néo-gothiques de la charpente.
La Bourse d’Anvers (Handelsbeurs) remonte en effet à un bâtiment érigé en 1531, qui se trouvait être la première bourse de commerce moderne, sur laquelle ont été modelées d’autres bourses d’Europe. En 1858, un incendie a complètement ravagé l’édifice. La Bourse actuelle a été construite au même endroit dans un style néo-gothique par l’architecte Jos Schadde, qui y a intégré de nombreux éléments du bâtiment d’origine. En 1894, elle fait l’objet d’une extension du même style, la Bourse des bateliers (Schippersbeurs).. À la suite du transfert des activités boursières à Bruxelles, le bâtiment était inoccupé depuis 1997 et, quelques années plus tard, il a été fermé au public pour des raisons de sécurité.
Rendre le lieu (semi-) public
La ville d’Anvers, propriétaire des lieux, a cédé le bail des deux bourses à Handelsbeurs Antwerpen NV, stipulant que les bâtiments devaient à l’issue des travaux de réaffectation conserver leur fonction de lieu de rencontre. Le grand hall de la Bourse a donc été transformé en une cour couverte semi-publique où les passants pourront prendre un snack et boire un verre. L’espace peut aussi accueillir des événements comme des congrès ou des présentations de produit. À l’étage, les anciennes salles de marché ont été aménagées en salles de réunions ; tandis que la Bourse des bateliers s’est métamorphosée en restaurant. Le projet comprend également le pâté de maisons adjacent dans lequel est situé un monument historique, l’Hôtel du Bois (ou « Groote Robijn »), qui sera converti en boutique hôtel de luxe.
Philosophie de restauration et philosophie générale du projet
La « Handelsbeurs » forme un patrimoine unique ; l’architecture de l’ancienne bourse, édifiée au 16e siècle sous la direction de Domien de Waeghemakere, servira de modèle à plusieurs bourses européennes. L’espace ouvert ceinturé, qu’on retrouve dans l’actuel bâtiment, offrait un lieu de rencontre pour les négociateurs. L’édifice actuel, construit sur les fondations de l’ancien et dans lequel la typologie du bâtiment original a été incorporée, confère au site une valeur patrimoniale exceptionnelle.
Etant donné que ce bâtiment et ses parachèvements intérieurs ont été considérés, dès leur création et jusqu’au début du 20e siècle, comme une oeuvre d’art totale, il semblait évident d’inscrire la philosophie de restauration et les différentes interventions de restauration dans ce même esprit. Pour ce qui concerne l’Hôtel du Bois, on tente ici avec soin de rétablir la distribution originelle de l’espace et les caractéristiques de la typologie de l’hôtel de maître du 18e siècle. La cour et le jardin, rendus illisibles par la construction de divers petits bâtiments, sont à nouveau dégagés. Les intérieurs de valeur sont remis en état. Une attention particulière est accordée à la première cour intérieure où une façade disparue est reconstituée sur base de documents d’archive.
Les éléments programmatiques plus lourds sont intégrés dans les bâtiments jouxtant l’Hôtel du Bois qui ne sont pas classés. Leurs façades, qui participent à la cohérence de l’ensemble bâti, sont entièrement conservées et restaurées.
Une réaffectation réfléchie
Le choix de la réaffectation de la « Handelsbeurs » a été guidé par le souhait de conserver la fonction d’espace de rencontre. La réaffectation comprend trois fonctions principales : le hall central fait office d’espace couvert semi-public pouvant être utilisé lors d’événements ; le premier étage offre des salles de réunion et de rencontre ; la « Schippersbeurs » est affectée à l’horeca. La restauration se concentre sur le rétablissement de l’oeuvre d’art totale de style néo-gothique ; les parachèvements intérieurs sont restaurés. Par ailleurs, de nouveaux équipements techniques et de sécurité sont intégré de façon quasi invisible.
Adapter le bâtiment aux normes actuelles
Le principal défi des trois partenaires du projet consistait à adapter au maximum le bâtiment aux normes de confort actuelles, sans compromettre la valeur patrimoniale de cette précieuse « oeuvre d’art totale » néo-gothique, dont les murs et plafonds sont décorés de peintures de grande valeur, de boiseries ornementées et de vitraux. Les travaux de restauration ont veillé à la meilleure restitution possible des finitions intérieures, tandis que de nouvelles technologies et des dispositifs de sécurité étaient intégrés de façon quasi invisible. Ainsi, dans le grand hall, l’installation de chauffage est particulièrement discrète. À noter aussi l’exploit de l’entrepreneur Denys qui, pour creuser un parking souterrain de trois étages sous le complexe boursier, a placé l’ensemble des bâtiments concernés sur une structure de pieux temporaire.