Archi-militant : Quand Chicago pleure, c'est le monde entier qui sanglote

Helmut est de ces êtres subtils qui ont cette faculté de marquer leur environnement de leur empreinte et de consacrer leurs journées à travailler ferme plutôt qu'à faire parler d'eux. Un architecte comme on voudrait en voir plus souvent : étoile parmi les stars, mais trop accaparé par son travail pour se préoccuper de sa réputation. Pendant les décennies qui ont suivi les Golden Sixties, et dès la fin de ses études à l'Illinois Institute of Technology, Helmut s'est vite rendu incontournable dans la ville de Chicago, alors en transformation profonde.

Rebelle au courant moderniste dans un premier temps, il faisait partie du 'groupe des sept' - sorte de ‘gang’ d'architectes non-alignés - avant de marcher dans les pas de l'architecte moderniste Ludwig Mies van der Rohe, lui aussi d'origine allemande et naturalisé américain, dont il a réussi à intérioriser la démarche. C'est marqué par ce personnage que le jeune Helmut a commis le Thompson Center alors qu'il n'avait que 39 ans. Il n'a eu de cesse, ensuite, de travailler, surtout à Chicago, mais aussi partout dans le monde. Notamment dans sa patrie d'origine, à Berlin, où il a signé le Sony Center, mais aussi avec des réalisations notoirement internationales comme l'aéroport Suvarnabhumi à Bangkok.

Sa mort tragique, survenue au coin de la rue alors qu'il évoluait à bicyclette, à une centaine de kilomètres de sa ville d'adoption, sans avoir marqué le stop réglementaire, aura en fin de compte contribué à le remettre bien malheureusement sous les feux de la rampe et de rappeler cette maxime funeste que ce cycliste distrait aimait tant : « Quand je travaille, je travaille très dur. Et quand je ne travaille pas, je dois faire quelque chose qui me permet de m'échapper complètement de mon travail. Comme la voile. Cela prend toute votre attention. »