22 projets pour réinventer Paris... sans respecter les architectes ?
Suite à l'appel à projets lancé par Anne Hidalgo fin 2014, 22 projets d'architecture ont été dévoilés par la Mairie de Paris le 3 février dernier. Prévus pour être livrés d'ici 2020, ils doivent moderniser l'allure de la capitale pour que « Paris ne devienne pas une ville musée ». On remarquera le peu de stars architectes parmi les lauréats ainsi que caractère hybride et vert des projets. Alors que beaucoup, même dans l'opposition, saluent le génie de la maire avec cette vaste opération, une voix discordante se fait entendre, celle de Catherine Jacquot, présidente du Conseil national de l'ordre des architectes, accusant Anne Hidalgo « d'exploiter la misère des architectes en les obligeant à travailler gratuitement. »
22 projets pour 23 sites.... réalisés pour la plupart d'ici 2020 !
Sur les 650 dossiers admis à concourir, 75 candidats ont passé les oraux le mois dernier. 22 projets ont finalement été retenus, correspondant aux 23 sites, propriétés de la Ville de Paris, qui avaient été proposés aux équipes. Il en manque donc un : les propositions relatives à l’hôtel particulier Villiers (XVIIe arrondissement) n’ont pas été jugées suffisamment innovantes. Les 22 projets lauréats devraient permettre la création de 1341 logements et rapporter 565 millions d’euros de recettes à la ville de Paris. Selon Jean-Louis Missika, Adjoint à la Maire de Paris, en charge de l'urbanisme, de l'architecture, des projets du Grand Paris, du développement économique et de l’attractivité (voir sa présentation du projet en vidéo au bas de cet article),
les projets vont être déployés à court terme avec des mises en chantier dès 2017 et des livraisons en 2019. « Si nous avions utilisé les méthodes classiques, il nous aurait fallu 20 ans. Là, ce sera beaucoup plus rapide, la plupart des projets seront réalisés d’ici à 2020. »
La carte des sites avec les projets lauréats est à consulter ici.
« Du cynisme pur et simple qui pourrait en inspirer d'autres »
Tout en reconnaissant la réussite de cette vaste 'opération de communication', la présidente du Conseil national de l'ordre des architectes n'est pas tendre avec Anne Hidalgo. « Il y a des règles à respecter. En concours d'architecture, les équipes finalistes sont payées à hauteur de 80 % de la mission réalisée dans le cadre du concours : il s'agit de ce qu'on appelle un avant-projet sommaire qui aborde déjà beaucoup de précisions et intentions. Pour un bâtiment de 20 000 m2, ce sont des mois de boulot et des dizaines de milliers d'euros ! Là, les soixante-quinze finalistes ont tous été au-delà, en fournissant l'équivalent d'un avant-projet détaillé, sans aucune garantie de toucher quoi que ce soit. (...) Dans une opération aussi emblématique que Réinventer Paris, on en attendait plus de la Ville. Elle aurait pu imposer d'emblée un cahier des charges qui crée des règles et prévoie au moins des défraiements. Autre possibilité : elle avait aussi largement les moyens d'indemniser elle-même tout ce travail car elle fait quand même à l'arrivée une très bonne affaire, de l'ordre de 560 millions d'euros ! Est-ce qu' on demanderait à des médecins, des avocats, des publicitaires de travailler ainsi gratuitement ? Au-delà de la désinvolture, j'y vois du cynisme pur et simple. » Et de conclure : « Paris a fait quelque chose d'autant plus grave pour notre profession que ça peut tenter d'autres villes. »