Je ne sais pas vous, mais moi, il y a des pays et des villes dans lesquelles je ne penserais -o grand jamais - effectuer une balade-découverte architecturale. Et le Qatar en fait assurément partie.
Rien à voir avec le fait que ce territoire trois fois plus petit que la Belgique soit essentiellement bâti de gratte-ciel (je pourrais les trouver bien pensés et même très beaux). Aucun rapport non plus avec le grand rendez-vous sportif qui va s’y dérouler (je ne suis pas allergique au foot).
Non, il y a autre chose : comme mes collègues l’ont déjà dit et redit, écrit et réécrit, le fait est que ces fameux gratte-ciel ont été construits à la sueur du front de travailleurs exploités. Le fait est aussi qu’un certain nombre d’entre eux y ont laissé qui leur vie, qui une jambe, une main ou un bras. Le fait est enfin que nombre de ces constructions ne sont pas franchement un modèle en matière de durabilité. Pourtant, ces constructions bénéficient souvent des dernières technologies, notamment en matière de HVAC, de génie électrique ou encore en ce qui concerne le choix des matériaux de construction. Mais c’est précisément dans cette débauche de moyens et dans le peu de prise de conscience par nos amis qataris du caractère fini des ressources de notre planète que le « modèle » me gêne aux entournures.
Cette semaine, ce malaise est ressorti avec plus d’acuité encore lorsque le projet commun de l’ASBL Cap Terre et du négociant en matériaux écologiques Bâtir l’Avenir a été porté à ma connaissance. Ces deux acteurs installés en province de Liège (très très loin donc de Doha) se sont en effet mis en tête de développer une filière de récupération de matériaux (déchets de fibres de bois, de tiges de chanvre...) afin d'en faire des matériaux isolants et de les utiliser comme composants de matériaux isolants régénérés. Cerise sur le gâteau : la mise en place de la filière permettra chaque année la formation et la possible remise au travail de personnes précarisées, loin, très très loin de ce que va nous donner à voir le Qatar à l’occasion de cette fameuse coupe du monde « hivernale ».
À l'heure où ce pays pétri de valeurs progressistes piaffe d'impatience de faire découvrir au monde entier ses inepties architecturales récentes, son sens très particulier de l'utilisation rationnelle des ressources et des énergies, je pense que ce contraste méritait d’être mis en évidence. Et un, et deux, et trois zéro pour la récup !