BURO II ARCHI + I : le management BIM dans un bureau de 120 collaborateurs

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Lors d’une longue interview consacrée au BIM-management, Bart Vande Kerckhove, ingénieur civil architecte et BIM-manager chez BURO II ARCHI + I, a pu témoigner de son expérience de l’implémentation du BIM et nous délivrer quelques conseils utiles. BURO II ARCHI+I dispose de ses propres services d'études techniques, et développe son expertise BIM depuis 2012.

Une implémentation à partir de la phase d’exécution

Bart Vande Kerckhove : « Le passage à une méthode de travail BIM demande toujours des investissements considérables dont il faut pouvoir démontrer la rentabilité au fil du temps. BURO II ARCHI + I a choisi d’adopter le BIM à partir de la phase d’exécution. L’une des raisons en est que, dans la phase d’élaboration des dossiers d’exécution, les études techniques sont définitivement accomplies, et qu'à cette phase, toutes les données sont déjà disponibles pour la production d’un métré. »

« D’autre part, au vu de la complexité des éléments dans la partie architecturale, l’implémentation s’est avérée plus facile à partir du service stabilité : la gamme des éléments structurels y est plus limitée et moins soumise à la vision des concepteurs. Les plans de coffrage et les quantités peuvent déjà être immédiatement déduits du modèle, et d’autres optimisations pourront suivre, comme le lien intégré entre les logiciels Revit et Robot pour le calcul structurel. »

« Aujourd’hui, le premier jalon proposé par le management est atteint : les disciplines architecture, stabilité et techniques spéciales sont capables de construire un modèle BIM, pour par la suite en extraire leurs plans d’exécution et leurs quantitatifs. Entre-temps les efforts nécessaires ont été accomplis pour instaurer la méthode BIM plus tôt dans le processus, ou autrement dit, pour mettre en place un processus de conception orienté BIM afin d’assurer un flux d’information efficace du début à la fin. »

 

Les avantages de la centralisation du modèle

B.VD.K. : « Chaque intervenant (architecte de conception, architecte de projet, modeleur BIM, ingénieur-stabilité, ingénieur-techniques…) pourra suivre la constitution de l’information sous forme d’un modèle virtuel 3D centralisé. Il pourra en outre aller y extraire les informations dont il a besoin, ainsi qu’y ajouter les siennes propres. En outre, l’information sera encodée une seule fois, ce qui permettra par exemple d'éviter que certains calculs soient inutilement répétés. »

« Quand il s’agira plus tard de réaliser les études volumétriques, il sera notamment possible de déterminer très tôt dans le processus de conception la tendance en matière d’utilisation de l’énergie, le prix des menuiseries (par surface), l’étude d’ensoleillement, etc, et ceci pour différentes options de conception. Avec des efforts limités, on obtiendra ainsi des arguments fondés et fiables. »

 

Points d’attention lors de l’implémentation

B.VD.K. : « L’implémentation, qui s’accompagne d’une baisse temporaire de la productivité, n’est que difficilement compatible avec les échéances serrées des projets. Il faut donc prévoir suffisamment de temps pour le développement des premiers projets. BURO II & ARCHI+I a pu compter pour son implémentation du BIM sur les connaissances du bureau d’architectes hollandais EGM-architecten, qui avait déjà 7 ans d’expérience dans le domaine. Le projet de la prison de Haren a été élaboré avec eux. À la suite de cette collaboration, un accord a aussitôt été conclu pour un accompagnement en matière d'implémentation. En phase de démarrage, le bureau a ainsi pu très vite confronter ses méthodes de principe à une expérience pratique. »

« En tant que BIM-manager, il faut faire appel, lors de la phase d’implémentation, à des collaborateurs internes enthousiastes en qui le microbe du BIM se diffusera, puis les persuader de démontrer l’efficacité de leur nouvelle méthode de travail : progressivement, l’intérêt se répandra aussi chez les moins convaincus. Il faut également veiller à une bonne réactivité. Les collaborateurs qui ont des questions sur l’élaboration des projets ou qui stagnent doivent immédiatement être aidés. Cela permet de minimiser les frustrations potentielles, et également d’éviter de devoir retourner à l’ancienne méthode de travail. »

 

Quelques conseils pratiques

B.VD.K. : « Il est absolument essentiel qu’un protocole BIM soit mis en place au début du projet. Il s’agit d’un document contractuel où seront par exemple définis les attentes autour du modèle BIM, les tâches et les responsabilités des différents intervenants, la manière de collaborer, la méthode de modélisation, le LOD (Level of Development) par catégorie d’objet, le planning du projet, … »

« Pour le projet OCMW Bellegem, l’architecture, la structure et les techniques ont toutes été modélisées en interne. Le modèle BIM a ensuite été diffusé au format Navisworks lors de l’appel d’offres. Grâce au viewer gratuit accompagné d’un mode d’emploi, les entreprises ont pu analyser et contrôler le modèle, sans avoir accès aux données du modèle source. »

 

ROI et nouveaux contrats

B.VD.K. : « Les retours sur investissement sont perceptibles à différents niveaux : grâce au BIM, il est possible d’éviter les conflits sur chantier parce que le bâtiment est construit une première fois virtuellement avant sa mise-en-œuvre effective. L’avantage que l’on tire de la mise en place d’un modèle digital est très important pour tous les partenaires de la construction. Mais pour que le modèle soit utilisable par les entreprises, il est fondamental qu’il soit élaboré suivant les règles de l’art. Si les entreprises retirent un bénéfice d’un modèle utilisable sans adaptations, l’élaboration de ce modèle peut devenir une source de revenus pour les architectes. Les coûts épargnés en évitant certaines erreurs se répercuteront avantageusement sur le coût total du projet. »

« La question de savoir si les maîtres d'ouvrage sont prêts à rémunérer un nouveau partenaire dans le processus, le BIM-manager, est importante. L’accompagnement et la coordination du processus BIM exige toujours plus de compétences spécifiques et prend du temps. Le maître d’ouvrage, qui voit l’architecte comme un concepteur et un coordinateur, suppose selon toute vraisemblance que ces tâches lui reviennent de toute façon : l’architecte est supposé, comme par le passé, éviter les fautes de construction et vérifier que les études spécifiques de stabilité et de techniques s’insèrent sans conflit dans son projet architectural. Le processus BIM est en cela une aide précieuse, qui va certainement permettre de minimiser les fautes par rapport à la manière traditionnelle de travailler, mais qui pourrait aussi ne pas être prise en compte par le maître d’ouvrage comme un surcoût à intégrer. Si l’on veut stimuler l’usage du BIM, un bon contrat de collaboration est donc indispensable. Et pour pouvoir vendre les modèles des architectes aux entreprises, il faudrait que la manière d’élaborer un modèle 3D en Belgique soit clarifiée. Des règles sont nécessaires parce qu’il y a un manque d’accord concernant la construction des modèles. Il faudra toutefois veiller à ce que ces règles clarifient le processus, mais ne limitent pas les possibilités de conception. »

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