Les Arcs, espace créatif pour les architectes et les urbanistes, a 50 ans

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Il y a 50 ans, dans la vallée savoyarde de la Tarentaise, tout était blanc. Aujourd’hui, lorsque la saison du ski bat son plein, tout est noir de monde. La station des Arcs a été créée de toutes pièces il y a 50 ans, avec une vision de l’architecture très particulière et unique en son genre. Un demi-siècle plus tard, quel regard porter sur cet « espace créatif pour les architectes et les urbanistes », comme le définit le site internet de la station française ?

 

Dans les années ‘60, en France, les sports d’hiver se démocratisent et les projets de création de stations de ski se multiplient. La rencontre de trois personnes va s’avérer déterminante pour la conception et la création de la station des Arcs : deux ‘papas’ - Roger Godino, jeune entrepreneur de Chambéry passionné de ski et Robert Blanc, guide de haute montagne chevronné - et une ‘maman’, Charlotte Perriand, designer reconnue, inspirée par le Mouvement Moderne de Le Corbusier, qui a déjà conçu son propre chalet à Méribel au sortir de la Seconde Guerre Mondiale. 

4 villages créés ex nihilo

Ces trois-là s’entendent pour, à partir de rien (si ce n’est un écrin naturel jusqu’alors préservé), créer une station de sports d’hiver sur l’alpage communal où Robert Blanc a grandi. Ils s’entourent d’architectes, d’ingénieurs, de promoteurs, d’élus locaux, d’agriculteurs et de sportifs. En décembre 1968, la station-village Arc 1600 (dites ‘seize cents’) sort de terre et accueille ses premiers skieurs dans un premier hôtel, Les Trois Arcs. Elle est depuis devenue une référence mondiale pour les professionnels de l’habitat de loisirs et a servi de référence architecturale (entre autres) pour ses trois stations ‘sœurs’, Arc 1800, 2000 et 1950.

La ‘patte’ de Charlotte Perriand

La ligne architecturale des Arcs, c’est Charlotte Perriand qui la conçoit (sur base des réflexions de Le Corbusier sur la cité moderne), la travaille et la défend. Elle imagine « un projet qui gravirait la pente pour former un ensemble, où chaque étage aurait une vue sur l’horizon. » « Sa conception de la fonctionnalité, du ‘geste juste’, de la forme utile, simplement belle sans design et sans décoration ajoutée, inspire une architecture conçue de l’intérieur vers l’extérieur », explique-t-on sur le site de la station de sports d’hiver. Avec le promoteur Roger Godino, Perriand collabore pendant 20 ans à la création des différents sites, entourée par un collectif d’architectes et d’urbanistes qui partagent les mêmes convictions du mouvement moderne.

Architecture de pente et préfabrication

Plusieurs règles s’imposent aux concepteurs : respect du site et du milieu naturel, conservation des chalets d’alpage existants, choix d’une station sans voitures, chemins piétonniers structurant l’organisation urbanistique, utilisation de matériaux locaux et surtout intégration de l’architecture au paysage et à la pente. Les bâtiments construits se signalent également par l’absence de vis-à-vis entre les logements, les balcons et les terrasses ainsi que la recherche d’un ensoleillement maximal.

Pour Arc 1800 (dites ‘dix-huit cents’), on développera des larges baies vitrées pour le contact avec l’extérieur, des balcons surélevés et des cuisines ouvertes. Mais Charlotte Perriand mènera également une réflexion sur la préfabrication des principaux aménagements intérieurs des appartements : mobilier minimaliste et fonctionnel, salles de bain en polyester rouge orangé… Une conception de l’architecture d’intérieur et un procédé de préfabrication très novateurs pour l’époque !

Deux autres villages, très différents

La construction du 3e village, Arc 2000, fait l’objet d’un concours entre trois équipes d’architectes. Le projet est finalement confié à Bernard Taillefer, qui, chargé de composer un ensemble de 5 000 lits, imagine ce village comme un « fort qui doit se fermer à la tempête et s’ouvrir au gai soleil. » Le traitement élancé des toitures d’Arc 2000 évoque les tremplins du saut à ski, formant un ensemble compact tout en créant un lien entre l’architecture des lieux et le panorama sur le Mont Blanc.

Quant au ‘petit dernier’, créé en 2003, Arc 1950, il est totalement intégré au domaine skiable et oscille en permanence entre tradition et modernité, entre rusticité et sophistication. Robert Jérôme, à l’origine de la conception de ce 4e village, explique avoir « opté pour une architecture traditionnelle traitée de façon moderne avec des matériaux de la vallée : toitures en lauses, utilisation de la pierre et du bois. »

Quelques critiques

Si, comme l’explique à Radio France Michel Giraudy, actuel maire des Arcs, « 50 ans après sa création, on s’aperçoit que l’architecture très originale des Arcs constitue une valeur certaine, d’ailleurs classée patrimoine mondial », à l’époque, l’architecture de Charlotte Perriand et de ses acolytes ne plaît pas à tout le monde. Le problème, dit-on à l’époque, « c’est qu’elle nie l’architecture locale. Les architectes et promoteurs développent dans ces stations d’altitude tous leurs rêves et leurs fantasmes. Ils mettent en avant une architecture très puissante. Dans les petits villages, cela était mal compris car, à l’époque, on était en perte démographique, les gens étaient expropriés de leurs alpages, c’étaient des drames terribles… ». Il n’empêche que, construire un village en y interdisant l’accès aux véhicules automobiles était très révolutionnaire… mais fort peu dans l’air du temps !

Et aujourd’hui ?

Si les bâtiments ont subi peu de modifications à l’extérieur – à part les nécessaires rafraîchissements, l’intérieur de nombreux appartements a par contre été profondément transformé et modernisé, parfois même à l’opposé des principes originels mis en place par Charlotte Perriand. Ce qui n’empêche aucunement le travail de cette dernière de se voir encore et toujours reconnu, même après sa mort, puisque les fameuses salles de bain en polyester d’Arc 1800 sont aujourd’hui devenues… des pièces de musée (au Centre Pompidou).

 

Source Les Arcs

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