Règles de l'art et signes de qualité dans la construction
Ce mercredi 13 janvier 2016, l’UPA-BUA organisait à l’Architects’House (dans le cadre de ses « mercredis de l’UPA ») un séminaire sur les règles de l’art et signes de qualité dans la construction. Cette soirée s’articulait autour d’un ouvrage écrit par Michel Procès, Olivier Haenecour et Thierry Loth, tout récemment paru aux Editions Larcier (dans la collection « Droit immobilier ») : Guide pratique des règles de l’art. Contraintes et signes de qualité dans la construction.
Présentation structurée des règles de construction
Le premier intervenant de la soirée, l’architecte Michel Procès (Secrétaire de l’UPA-BUA), a présenté les lignes essentielles de cet ouvrage, qui offre une synthèse structurée de l’ensemble du vaste domaine des prescriptions et des systèmes de certification et de qualification utilisés et rencontrés en Belgique. Ceux-ci émanent de très nombreuses instances : Europe, Etat fédéral, communautés et régions, organismes divers de référence (dans les domaines de la normalisation, de la recherche, de la certification, de la formation ou de l’information).
Grâce à l’apport des deux co-auteurs avocats, ce panorama a pu bénéficier de la rencontre des points de vue des juristes et des professionnels de la construction et permet de clarifier les concepts et de hiérarchiser les différents documents de référence qui constituent l’ensemble des « règles de construction ». Celles-ci regroupent :
- les contraintes techniques imposées légalement ;
- les contraintes techniques imposées contractuellement ;
- et les « règles de l’art » proprement dites dont l’application est volontaire et qui regroupent : les normes et documents normatifs (EN, NBN, PTV, NTN, etc.), les documents généraux de référence (STS, NIT, DT, etc.), les cahiers des charges de référence et « les autres références » (publiées par les centres de recherches et autres organes).
Les systèmes de certification et de qualification
Après avoir fait la synthèse de ces outils de prescription, Michel Procès a présenté les outils complémentaires de certification et de qualification, qui peuvent être réglementaires (et européens comme le label CE) ou volontaires (et belges, comme la marque BENOR ou les ATG).
Ces outils peuvent s’appliquer à de nombreux objets :
- des produits (matériaux, systèmes et kits de construction) ;
- des acteurs (accès à la profession, agréation, qualifications complémentaires) ;
- des systèmes de management (AQ, sécurité, environnement, social, éthique) ;
- des ouvrages (bâtiments : HQE, BREEAM, LEED) ;
- des services.
Il a terminé son intervention en soulignant l’effrayante complexité des références auxquelles est confronté le professionnel belge, et le manque d’outil de synthèse (comme il en existe à l’étranger). Il a également regretté :
- le manque de coordination entre les très (trop) nombreuses instances émettrices de ces prescriptions (ainsi que les confusions dans les appellations);
- le manque de représentation des professionnels impliqués lors de l’élaboration de ces impositions ;
- ainsi que le manque de retour d’expérience par rapport aux résultats concrets et difficultés de leur application.
Le degré de connaissance des règles de l’art attendu des professionnels
Me Olivier Haenecour (Bâtonnier du Conseil de l’Ordre des avocats de Mons) est revenu sur la définition des règles de l’art qui sont incontournables même si elles sont dépourvues d’une réelle définition légale (et même si elles ne sont pas écrites) et si elles font partie du domaine « volontaire ». Cela implique, pour l’auteur de projet, de devoir s’informer (en fonction des besoins du projet), d’informer et de conseiller son client (dans les limites de ses « spécialités »).
Il a illustré son exposé par deux exemples :
- le contrôle de l’accès à la profession des entreprises choisies (avec les sanctions pénales qui y sont liées) qui a été développé par le dernier intervenant de la soirée ;
- un cas de défauts constatés sur des châssis.
Les problèmes posés par l’évolution dans le temps des règles de l’art et par les tolérances
L’intervenant suivant, Me Thierry Loth (Avocat à Mons) s’est penché sur deux points abordés dans le guide, le premier étant l’importante question de la temporalité, à savoir « quelles sont les références qui sont censées être d’application dans un projet donné ? ».
En se basant sur différentes décisions de justice, il a indiqué que l’on se réfère généralement à « tout ce qui est rendu accessible » dans « l’état actuel des connaissances » (l’auteur de projet pouvant éventuellement en être exonéré parce que « à l’époque de la construction, tout architecte ne pouvait savoir … »). Il a cependant également montré que l’obligation d’information se heurte aux confusions et contradictions issues des parutions disparates (écarts temporels) des documents de référence qui perturbent leur hiérarchie (NBN, STS, NIT).
Il s’est ensuite penché sur l’important problème des tolérances en relevant que, si les architectes ont au départ une obligation de moyens (et non de résultat), on rencontre désormais un nombre croissant d’exceptions (prestations simples et sans aléas, exigences réglementaires ou reconnues comme minimales par exemple). La question des tolérances (qui sont les écarts acceptables entre ce qui est spécifié ou souhaité et ce qui est réalisé ou obtenu) est donc essentielle, sachant qu’elle est à l’origine (selon de CSTC) de 16% des litiges.
Le contrôle des capacités entrepreneuriales
Ce point, succinctement abordé dans le guide au chapitre des outils de qualification des acteurs (et anciennement dénommé « accès à la profession » des entrepreneurs) a été développé par l’architecte et expert Cédric Bourgois (membre du Conseil d’administration du CEAB), qui a présenté le Guide d’aide au contrôle des compétences entrepreneuriales rédigé par le Collège des Experts Architectes de Belgique (CEAB) et qui sera diffusé prochainement.
Après avoir présenté succinctement les nouvelles dispositions générales imposées aux entreprises lors de leur inscription à la BCE (Banque Carrefour des Entreprises) et les compétences professionnelles (dix catégories de travaux) demandées aux entreprises de construction par l’AR du 29/01/2007 (et vérifiées par le guichet d’entreprises), il en a abordé le difficile problème du contrôle.
Afin d’aider les auteurs de projet dans ce difficile exercice, les auteurs du guide du CEAB ont réalisé plusieurs arbres de décision successifs qui ont été rapidement parcourus mais qui ont permis aux participants de se faire une idée de la complexité du processus.
Comme lors des « mercredis de l’UPA » précédents, les participants ont ensuite pu poser des questions aux intervenants et partager leurs avis sur les questions abordées autour d’un verre.