Alors que la toiture faisait jadis essentiellement office d’étanchéité à l’eau, son statut de ‘cinquième façade’ lui confère aujourd’hui bon nombre d’autres fonctions. Comme par exemple assurer le confort thermique et acoustique à l’intérieur des bâtiments. L’isolation du toit est logiquement devenue un facteur très important mais exige qu’on lui accorde beaucoup d’attention lors des phases de conception et de réalisation. « Pour la bonne santé du toit mais aussi de tout le bâtiment, il est crucial d’opter pour la bonne isolation et la meilleure méthode de placement », insiste Philippe Franchini (IKO).
De nos jours, une toiture bien isolée est une nécessité, étant donné les normes énergétiques sans cesse plus strictes et l’augmentation constante des prix de l’énergie. Cependant, comme c’est le cas dans de nombreux autres domaines dans le secteur de la construction, le grand nombre de produits sur le marché ne permet pas toujours de s’y retrouver facilement. Quel système d’isolation les architectes peuvent-ils prescrire idéalement et sur quels critères se baser pour choisir ? Pour quelle méthode d’application les entrepreneurs et les couvreurs peuvent-ils opter dans certains cas spécifiques et de quels aspects ce choix dépend-il ? Dans ce quatrième article de la série de Bitubel sur les toitures plates bitumineuses, Philippe Franchini (IKO) nous donne une leçon d’isolation de toiture en passant en revue les critères à prendre à compte, que l’on soit architecte, entrepreneur ou couvreur.
Philippe Franchini : Les dernières années ont vu une forte évolution en matière d’isolation de toiture. Une évolution essentielle est la réduction de la consommation énergétique des bâtiments et l’augmentation des épaisseurs de l’isolant qui en résulte. Il existe différents matériaux isolants, qui ont chacun leurs caractéristiques propres, leur valeur lambda et leurs avantages et inconvénients. En fonction de l’application, un matériau sera plus pertinent qu’un autre. Le groupe le plus important est celui des isolants en polyuréthane et polyisocyanurate (PUR et PIR). Ensuite, on trouve la laine minérale, le verre cellulaire et le polystyrène extrudé et expansé, qui sont surtout mis en œuvre dans des applications de niche. Les rouleaux bitumineux pour toiture peuvent être combinés avec chacun de ces isolants et sont garants d’une très grande longévité en comparaison avec d’autres revêtements de toit. Pour chaque application, il existe donc bien une solution technique faisant appel à un revêtement bitumineux.
Le bitume offre-t-il encore d’autres avantages en matière d’isolation des toitures plates ?
L’avantage le plus important est que l’étanchéité bitumineuse peut être posée en une ou deux couches, ce qui offre une belle flexibilité lors de la construction du toit. Pour illustrer cet atout à ne pas sous-estimer, citons un projet récent de plusieurs centaines de mètres carrés, pour lequel l’entrepreneur général souhaitait isoler la toiture le plus rapidement possible à l’approche de l’hiver pour pouvoir réaliser d’autres travaux dans le bâtiment lui-même. Des sous-traitants devant encore intervenir sur le toit, le couvreur ne pouvait pas se risquer à placer directement l’étanchéité définitive. Les sous-traitants l’auraient alors abîmée. La solution a été trouvée dans un système bicouche. Le pare-vapeur, l’isolant et la sous-couche furent d’abord placés, puis un chemin fut délimité par le couvreur pour les sous-traitants en utilisant du caoutchouc de récupération. Ce n’est qu’une fois les travaux exécutés que la couche bitumineuse supérieure fut placée. Une plus-value énorme par rapport à d’autres systèmes, qui n’offrent pas une telle flexibilité.
« L’avantage le plus important est que l’étanchéité bitumineuse peut être posée en une ou deux couches, ce qui offre une belle flexibilité lors de la construction du toit. »
Dans quelle mesure l’étanchéité bitumineuse protège-t-elle l’isolant sous-jacent ?
De manière parfaite. Les sous-couches bitumineuses qui font office de pare-vapeur peuvent être raccordées à la perfection avec les couches bitumineuses qui viennent au-dessus de l’isolant. Pare-vapeur et étanchéité à l’eau sont dans ce cas compatibles à 100 % et protègent totalement l’isolant, ce qui est indispensable pour garantir la longévité du toit plat. De nombreux couvreurs qui travaillent avec une étanchéité synthétique ont l’habitude de placer d’abord une sous-couche bitumineuse par-dessus l’isolant avant de poser l’étanchéité synthétique, justement en raison de cette compatibilité avec le pare-vapeur.
Quel conseil donneriez-vous aux architectes qui doivent prescrire une isolation de toiture ?
Tout d’abord, il s’agit de bien déterminer ce que l’on veut obtenir. Les exigences, caractéristiques ou fonctions envisagées pour la toiture (performance thermique, résistance, accessibilité, finition…) vous orientent vers un certain type d’isolation. PUR et PIR allient de bonnes performances thermiques à une épaisseur minimale, ce qui est un avantage considérable du point de vue architectural. Le verre cellulaire se prête bien aux toitures qui doivent supporter une forte charge (comme pour les parkings en toiture), certainement quand il est combiné avec un système bitumineux bicouche, qui minimalise le risque d’erreurs d’exécution. La laine minérale a toute son utilité là où des performances acoustiques élevées sont demandées. Le polystyrène extrudé (XPS) est quant à lui d’application pour les toitures inversées. Le bon choix au niveau de l’isolation est primordial pour la santé du toit et de tout le bâtiment.
Arrive-t-il parfois que des architectes prescrivent une isolation qui ne convient pas ? Comment éviter cela ?
Cela arrive mais c’est compréhensible. Aujourd’hui, l’architecte doit se tenir au courant dans tous les domaines et, par conséquent, on ne peut pas attendre de lui qu’il sache tout sur tout. Imaginons qu’il prépare pendant l’été un dossier dans lequel il opte pour une pose en collage à froid, alors que la réalisation effective du projet ne se déroulera qu’en hiver, rendant délicates les conditions de mise en œuvre de la colle à froid. De telles considérations pratiques échappent parfois inconsciemment à sa perspicacité. C’est pourquoi il a intérêt à se faire aider par un fabricant expérimenté, qui peut lui donner des conseils ciblés et ainsi le guider vers la solution optimale en fonction des circonstances et exigences. Ceci vaut d’ailleurs également pour le couvreur qui souhaite proposer un système alternatif à l'architecte.
Lorsqu’il choisit des plaques de PUR ou de PIR, l’architecte doit veiller à ce que la finition de ces plaques soit adaptée à la méthode de pose de l’étanchéité. Pour une application avec une sous-couche autocollante, la feuille de revêtement des plaques PUR ou PIR doit par exemple être compatible, et la sous-couche autocollante doit dans ce cas être pourvue de plots ou de bandes de bitume pour une bonne répartition de la tension de vapeur. Pour s’en assurer, mieux vaut consulter l’ATG (agrément technique) de l’isolant.
« L’isolation représente la plus grande part dans le coût total d’un toit. Si l’on compare un toit avec une voiture, on peut sans hésiter dire que l’isolation est le moteur. »
Les couvreurs peuvent-ils contribuer à la solution optimale en adaptant leur méthode de pose en fonction de la nature du projet ?
Certainement. L’isolant peut être placé de différentes façons : avec une colle PU, une fixation mécanique, du bitume à chaud, de la colle bitumineuse à froid ou simplement lesté. L’une ou l’autre méthode sera plus ou moins adaptée en fonction du type de support. Sur un tablier métallique ou un support en bois, une fixation mécanique s’impose, alors qu’elle n’est pas simple et plutôt laborieuse sur du béton. Dans ce cas, un système collé est plus simple à mettre en œuvre. Lors de conditions atmosphériques froides ou humides, notre préférence va au soudage à la flamme, à la fixation mécanique ou au lestage. Cette dernière option est moins appropriée pour un tablier métallique, parce qu’il faut alors tenir compte du poids du ballast pour dimensionner la structure de toit. Dans le cas de toitures végétalisées, pour lesquelles l’étanchéité doit avant tout résister à l’humidité et aux racines, la combinaison PIR/PUR et bitume à chaud s’impose. Les couvreurs qui n’aiment pas travailler avec la flamme peuvent faire appel à une colle bitumineuse à froid. En fin de compte, ce n’est pas seulement l’isolant choisi qui importe mais aussi la méthode de mise en œuvre.
Qu’en est-il des connaissances qu’ont les professionnels du bâtiment en matière d’isolation du toit ?
Pour ce qui concerne les toits plats, notre pays est vraiment une référence. Quand je compare avec d’autres pays dans lesquels nous sommes actifs, je remarque que la Belgique fait régulièrement mieux. Les connaissances techniques de nos architectes, entrepreneurs et couvreurs sont en général très élevées, et les normes sont claires et bien documentées… Il s’agit donc surtout de procéder à une bonne analyse du projet et de son contexte, afin de pouvoir déterminer le système adapté. L’isolation représente la plus grande part dans le coût total d’un toit. Si l’on compare un toit avec une voiture, on peut sans hésiter dire que l’isolation est le moteur. Par conséquent : si l’on souhaite que son investissement demeure rentable, il faut le protéger convenablement. Un revêtement bitumineux s’y prête à merveille.
Vous trouverez plus d’informations sur les toitures plates bitumineuses sur www.bitumeninfo.be.